La foi et les oeuvres
Serge était étudiant en journalisme. Cela ne l’a pas empêché d’être chef scout. Il venait me voir pour partager ses découvertes de la Bible. La foi et les œuvres étaient au centre de ses préoccupations. Il était tenté par les œuvres au détriment de la foi. Comme à l’époque des apôtres; comme maintenant, comme de tous les temps. L’histoire d’une vie, de la sienne, de la nôtre.
L’évangile de Marc relate une année de vie de Jésus. Elle est décrite en termes de montée depuis sa Galilée natale? jusqu’à Jérusalem. Sa vie y est présentée en deux étapes. La première, relatée dans les 7 premiers chapitres, est pleine de faits et gestes extraordinaires que Jésus accomplit avec autorité. Elle répond à la question qui est le messie. La seconde contient surtout des réponses à une autre question de quel sort de messie s’agit-il dans son cas.
Le messie à l’image du roi David, puissant, surement capable de bouter les romains hors du royaume d’Israël. Tout le monde en a rêvé, les apôtres évidemment aussi, et même après la résurrection de Jésus ils lui posent encore cette question, vas-tu enfin rétablir notre royaume?
Au titre de Messie, Jésus préfère celui de fils d’homme. Mais là aussi le titre nécessite des précisions essentielles. Il y a deux manières de considérer dans la Bible le titre de fils de l’homme. Chez le prophète Ezéchiel le terme est employé pour signifier chaque fois un homme mortel. Or chez Isaïe (la lecture d’aujourd’hui par exemple) le fils de l’homme est celui qui est le serviteur de Dieu. Ce terme ainsi décrit correspond parfaitement à Jésus.
Jésus a accepté de souffrir pour notre salut. Il savait que le jour de justice viendrait. Sa résurrection en est le signe le plus éclatant. Et il montre le même chemin à ceux qui veulent le suivre.
Quand on veut aller plus vite que la musique, on dit : “toi, tu as la foi, moi, j’ai les oeuvres”. Dans le meilleurs de cas, cela se résume par dire de façon déguisée : vous priez pour nous, mais nous on agit. Qui ne serait pas tenté par l’efficacité d’action à entreprendre pour soulager la misère du monde.
Les œuvres sont du coup mises en avant et la foi est derrière pour soutenir les actions, pour les justifier. Mais pas pour s’en nourrir dans les actions, pour les y enraciner. C’est contradictoire, et cela entraîne une schizophrénie entre la vie et la foi. Une atrophie de la foi ne fait pas briller d’une lumière plus éclatante les œuvres. Mais hélas, c’est une illusion dans laquelle tombent beaucoup de post chrétiens.
Serge, quand il venait me voir du haut de ses 18-20 ans, c’était surtout pour dénoncer l’hypocrisie des croyants qui se gaussaient de la foi, mais dont les œuvres, si attendues, ne suivaient plus. Il semblait s’être arrêté sur cette position sans vraiment passer le cap de son auto critique au sujet de sa foi qui avait du mal à soutenir ses œuvres.
Il a fait comme la plupart des catholiques qui prennent la tangente, tous ces ados en âge et surtout en maturité qui cherchent leurs points d’appuis solides surtout ailleurs pour se construire. Un choix difficile se fait souvent au prix de la pesée du pour et du contre. Mais on ne travaille qu’avec les éléments dont on dispose. Et qu’on se donne.
Quelle responsabilité collective en famille, en communauté, dans l’Eglise. Responsabilité pour aider chacun à construire sa vie sur les bases de la foi solide, où la vie éternelle conditionne la qualité de notre vie sur terre.