Maison, avec les vacances, voyages et ses changements de lieu où se poser la nuit, tout cela rime avec changer de maison. Durant les deux mois passés en Europe j’ai dû le faire une bonne quinzaine de fois. Et chaque fois j’ai été accueilli les bras et la porte ouverte.
L’évangile d’aujourd’hui nous parle d’une maison bien particulière, pour y entrer il faut aussi des clés : tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Église et je te donnerai les clés du royaume des Cieux. C’est une maison avec une entrée qui nécessite aussi une clé. Jésus n’invente pas l’histoire des clés mais lui donne un sens nouveau. Janus, dieu des dieux du panthéon romain, détient aussi les clés du ciel païen. Cette image a sûrement facilité l’adhésion des païens à la nouvelle religion, l’inculturation est un principe bien pratique partout et de tout le temps.
Jésus fait sans doute référence à la clé de Eliakim, successeur de David, qui remplace Schebna, le déchu. Dans la Bible les clés sont confiées aux humains, elles ne sont pas données une fois pour toute, et peuvent être retirées pour les donner à quelqu’un d’autre. Cependant cela semble contredit par Jésus lui-même qui formellement les donne à Pierre et à sa “spirituelle descendance”. Cela signifie avant tout la responsabilité. Si Pierre est chargé de clés, et il en a deux, ce qui veut dire qu’il en a une grande double responsabilité. Une pour ouvrir le ciel et une autre pour gouverner en attendant. C’est le sens de deux clés dans le blason papal ; la clé d’Or pour ouvrir le ciel et la clé d’Argent pour gouverner.
Le risque momentanément, par endroit…, celui de perdre une de deux clés, est réel. C’est ainsi lorsque les responsables (pape, évêques, prêtres et jusqu’à catéchiste, parent, tout baptisé, tous en situation de responsabilité à des niveaux différents, mais tout de même) déconnectent du réel, par un de deux bouts, soit celui de la foi, soit celui de la vie concrète. Et cette déconnexion se fait soit par une spiritualité étriquée, (indulgence pour soi mais pas pour les autres, cf parabole du débiteur impitoyable), soit par une récupération de la religion pour des raisons idéologiques, (messianisme politique). Si l’on fait pas bien attention, le besoin éducatif en fait partie. Si l’on cherche seulement à éduquer correctement les enfants dans la religion chrétienne, y compris en les faisant passer par les étapes de la vie chrétienne (baptême, communion profession de foi, éventuellement confirmation, mariage et même funérailles…) c’est de fait pour entrer dans l’espace de gouvernance en faisant activer la clé d’Argent, mais pas la clé d’Or qui ouvre les portes des cieux. Si en revanche l’on utilise seulement la clé d’Or c’est comme dans la parabole des invités des noces, pour vouloir faire entrer celui qui n’a pas le vêtement de noces.
Jésus est la porte et Pierre est le portier qui fait entrer d’abord dans l’Église comme antichambre des cieux dont les portes sont déjà entrouvertes. À l’Église d’indiquer la bonne porte, tout en tenant les deux clés en état de marche.
Tenir les deux clés en même temps, c’est chercher à incarner la foi dans la vie quotidienne.